Bouna Medoune SEYE – Sénégal

Bouna Medoune Seye, Bissao 1992 © Photo P. Martin SaintLeon
Bouna Medoune Seye, Bissao 1992 © Photo P. Martin Saint Leon

BOUNA MEDOUNE SEYE (1956-2017)

  

PHOTOGRAPHE, METTEUR EN SCÈNE, ARTISTE FRANCO-SÉNÉGALAIS.

  

BOUNA…

Jean Loup Pivin
  
Dorris Kasco Haron, en larmes, m’a appris la disparition de Bouna le jour de sa mort, ce mercredi 27 décembre 2017.
  
Égoïstement je pense que Bouna est parti sans que nous ayons recollé les verres brisés de notre dernière brouille en 2012 à Paris, à Revue Noire. J’en suis aujourd’hui malheureux et triste car depuis notre rupture d’amitié, je sus que Bouna était malade d’un cancer du poumon pris tardivement.
  
Vingt ans d’amitiés et d’aventures ensemble ne pouvaient pas se conclure ainsi. 1990 fut l’année de notre rencontre, 2012 fut une année néfaste pour les miens comme pour moi, à laquelle il fallut ajouter cette rupture avec Bouna que j’avais au cœur. Je ne pouvais plus me confronter aux énièmes exigences financières, cette fois-là agressives, d’un Bouna avec lequel nous ne faisions plus rien depuis plus d’une décennie. Cet argent obsédant dont il avait besoin, non pas pour lui, mais pour rester le seigneur qu’il se voulait être et qu’il était et surtout pour se précipiter dans ses voyages intérieurs sans cesse plus longs, plus calamiteux, plus destructeurs.
  
Je ne jugeais pas, ni ne faisais la moindre morale. Je le savais c’est tout.

[… suite de la page d'ouverture …]

Je le savais quand il allait m’attendre à l’aéroport pour s’arrêter sur la route dans un fantomatique quartier, quand nous traînions des nuits durant de bars en boites et qu’il disparaissait anxieux pour mieux continuer apaisé nos équipées qui se terminaient invariablement à l’US Gorée, une boite de plein air dans le port, aujourd’hui disparue, avec des marins trop saouls pour prononcer quelque mot sinon se battre, des putes qui dansaient, seules, sans plus aucun souci de conquête, et les derniers noctambules venus chercher, derrière le grillage du bar, une dernière bière ou un dernier gin tonic frelaté à vous casser la tête. Une image cinématographique qui n’a d’autre matérialité que le souvenir de ces années 1990. Bouna aimait ces décors d’une vie, de mondes à côté, ces mondes en dehors du temps de la ville et de ses ambitions.
  
L’amitié partagée avec Bouna était lourde à porter surtout quand dans ses excès, il partait dans des voyages si peu partageables. Peut-être avec Djibril Diop Mambety, son autre « maître » de vie, avec lequel nous avons déambulé dans quelques nuits dakaroises et qui s’allongeait à 4 heures du matin sur un trottoir et plongeait à poings fermés dans sa propre nuit. « Laisse-le » me disait Bouna, « les petits le protègent » (il parlait des enfants des rues).
  
Bouna n’avait pas toujours cette chance, et quelques fois, au plus profond de la nuit, devant le vendeur de chawarma de Ponty, je le voyais invectiver certains jeunes qui n’étaient plus jeunes, des sales gueules. Un jour je le revis le visage abîmé, le bras en bandoulière, de retour de clinique. « C’était des cons » me dit-il simplement. Je ne pouvais m’empêcher de penser à toutes les tractations, les mauvais deals, les abnégations auxquelles il a dû se confronter pour assouvir ses besoins. J’avais en tête le talent et la beauté de la jeune journaliste, à qui j’avais confié un article en 1992 pour le numéro Sénégal de Revue Noire, dont j’ai vu la déchéance de voyage en voyage. Et moi qui ne savais que donner de l’argent pour que je ne la vois plus comme cela. Elle avait réussi à détourner une somme que j’avais confiée à un ami pour qu’elle fasse une cure de désintoxication qu’elle m’avait dit accepter. Elle disparut si jeune et si belle, si vieille et si horrible avec ses trente ans. Cet argent me brulait l’esprit et m’abrutissait d’impuissance.
  
Je ne peux pas obérer cette face de Bouna avant d’évoquer les années riches de réalisations et d’une amitié que je voulais indéfectible, malgré tout. Que n’avons-nous pas rêvé fabriquer et fabriqué vraiment ensemble en dehors de ses conquêtes amoureuses et de ses enfers ou paradis ?
  
En 1990, alors que nous préparions la sortie du premier numéro de Revue Noire, je rencontre Bouna à Dakar avec lequel immédiatement des liens se forment. Étonnamment profonds. Il est marié à une jolie et intelligente femme, Minielle (Baro), avec laquelle il a un petit garçon. Il vit chez elle et ses parents dans une liberté qui m’étonne, tant cela ne ressemble ni à l’Afrique ni à l’Europe. D’entrée de jeu, nous sortons tard à la rencontre d’un Dakar nocturne, jazzy, vivant, créatif, snob, populaire… triste et sordide aussi.
  
Je découvre son engagement aux côtés des photographes Djibril Sy, Moussa M’Baye, Boubacar Touré Mandémory et Touré Béhan pour montrer la photographie sénégalaise. C’est d’eux que part l’initiative de créer un « Mois de la Photo de Dakar » qui se tiendra en 1992, avec l’aide du Centre Culturel Français dirigé alors par le formidable François Belorgey, assisté du photographe Bertrand Hosti.
  
Bouna fera un travail émouvant sur Mama Casset et son studio ”African Photo” qui vit passer tous les dakarois de 1943 à 1983 et qu’il me permet de rencontrer quelques mois avant la mort du photographe devenu aveugle et dont le fonds avait brulé une dizaine d’années auparavant. Bouna posait là une première pierre à une histoire de la photographie sénégalaise et africaine à créer, faisant ainsi écho à nos longues conversations sur le sujet. Et sur laquelle, avec Pascal Martin Saint Leon et Simon Njami, j’engageais résolument Revue Noire, avec un premier numéro spécial photo en 1991 et une première exposition en 1992 sur la photographie africaine au Centre Wallonie Bruxelles de Paris, dont Bouna et Mama Casset faisaient partie. Mama Casset mourut juste avant l’inauguration de son exposition à Dakar. Une exposition magnifique avec la présence de toute la bourgeoisie et l’aristocratie photographiées, dans des effluves de chouraï et de parfums poudrés, dans des tenues toutes plus ébouriffantes les unes des autres. De chair et d’os, elles étaient vivantes à côté de leurs photos dans lesquelles elles se reconnaissaient magnifiées. Chacune louait Bouna pour son initiative. Virevoltant de mondanité et d’aisance au milieu de ces princesses de tous âges, il montrait son appartenance à une bourgeoisie bien pourvue. Au cas où je n’eus pas compris depuis longtemps d’où venait sa désinvolture envers chacun. Il n’attendait rien de l’extérieur sinon du respect et de l’amitié. Et la reconnaissance de son talent. Pour ne pas perdre la mémoire de l’exposition, nous firent ultérieurement avec Gilles Foadé un livre Revue Noire sur « Mama Casset et les précurseurs de la photographie sénégalaise ».
  
Si Bouna avait une haute estime de ce qu’il faisait, il aimait aussi partager ses aventures artistiques : il aimait se reconnaître dans le mouvement artistique du Laboratoire Agit’Art, dont les artistes, hommes de scène, El Hadj Sy et Joe Ouakam étaient les « maîtres ». Deux caractères puissants, prolifiques, talentueux et généreux mais difficiles, toujours drapés dans leur orgueil au risque de passer à côté de rencontres bienveillantes. De cette amitié artistique et philosophique mais aussi d’attitude – rebelle –, il photographiera la Cour de Joe dans une longue série que nous montrerons au Couvent des Cordeliers à Paris en 1997 puis dans l’exposition « l’Afrique par elle-même » que Revue Noire conçoit et coproduit à la Maison Européenne de la Photographie à Paris, pour la faire ensuite voyager dans les lieux les plus prestigieux de Londres, São Paulo, Capetown, Washington, New York, Berlin, Bruxelles… de 1998 à 2007.
  
Bouna me fit connaître de jour en nuit, de séjour en séjour la scène artistique de Dakar. Dire son rôle prédominent dans la construction du numéro Dakar est pour le moins une reconnaissance évidente. Grâce à lui, nous avons pu faire l’enregistrement d’Aminata Fall, une vieille chanteuse de jazz qui aimait trop le vin rosé. Malheureusement il ne s’agit que d’une seule chanson, comme témoin d’un tel talent (nous produisions, quand les moyens nous le permettaient, un CD de découverte que nous offrions dans la revue : ce fut le cas pour Dakar avec aussi le premier rapp africain enregistré en 1992 des PBS, les Positive Black Soul).

'Les Trottoirs de Dakar' © Photo Bouna Medoune Seye 1992
'Les Trottoirs de Dakar' © Photo Bouna Medoune Seye 1992
'Les Trottoirs de Dakar' © Photo Bouna Medoune Seye 1992
'Les Trottoirs de Dakar' © Photo Bouna Medoune Seye 1992
'Les Trottoirs de Dakar' © Photo Bouna Medoune Seye 1992
'Les Trottoirs de Dakar' © Photo Bouna Medoune Seye 1992

Pour revenir au début des années 1990, très vite nous nous engageons à réaliser un livre sur sa série des fous de Dakar « Les Trottoirs de Dakar ». Bouna avait fait cette série sans aucune commande. Il montre son engagement pour une photographie du réel et dans des aspects qui pouvaient jouer le rôle de miroir interdit de lui-même. Fascination de ce que chacun peut devenir quand il ne trouve plus d’écho dans une société pour qui il devient à la fois monstrueux et transparent.
  
Bouna avait une façon de prendre en photo toujours avec des appareils énormes, pour bien montrer qu’il prenait en photo, ne s’en cachant jamais, donnant parfois des instructions à la personne photographiée. Il jouait avec les angles de vue en s’allongeant, en tordant son corps squelettique que ses longues et élégantes mains accompagnaient jusqu’au visage. On sentait son désir de rentrer dans une réalité, pas par effraction, mais par reconnaissance de sa présence.
  
Parallèlement à Bouna, nous réalisons un livre sur « Les Fous d’Abidjan » photographiés par Dorris Kasco Haron. Série, elle aussi faite sans commande. Associée aux publications, nous avons conçu, produit et fait circuler dans les centres culturels français d’Afrique, une exposition commune de leurs images. Cette exposition a permis que se forge une amitié entre eux. Elle ne s’est jamais démentie. Les amateurs et professionnels de la photographie, créaient un clivage entre ces deux regards opposant leurs talents. Jamais mon intention ne fut de les mettre en concurrence mais bien de les juxtaposer afin de montrer une complexité et probablement deux regards différents de deux hommes bien différents par rapport à une même réalité.
  
En 1994, nous montrons l’exposition des Fous et des Trottoirs dans le Off que Revue Noire (avec 14 expositions) organisa pour la première édition des Rencontres de la Photographie africaine de Bamako. Bouna s’amuse beaucoup de cette situation « à côté » qu’il affectionne particulièrement, alors que nous étions au cœur de l’émergence de la photographie en Afrique. On le retrouvera dans une édition des Rencontres de Bamako ultérieure dont Simon Njami était le directeur artistique et où il se fait un point d’honneur de ne rien faire comme les autres et de cultiver son attitude aristocratique et capricieuse.
  
Connaissant le talent multiple touche-à-tout de Bouna, nous participons financièrement (légèrement) à son premier court métrage « Bandit Cinéma ». Dans la foulée je confie à Bouna la réalisation d’une fiction courte qui s’avèrera bouleversante sur le sida par la drogue à Dakar, ” Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar », qui fut diffusée sur TV5 et toutes les chaines de TV africaines le 1er décembre 1995 dans une émission « Simplement une heure » que nous avions produite. Je pensais qu’il était le plus à même de traiter le sujet. Ce qui fut le cas, mais au prix d’un engagement dangereux.

Le sens de l’intensité de l’image de Bouna est entièrement perceptible dans cette œuvre dont j’écrivais le texte sous un pseudonyme. Notre connivence était profonde, nous envisagions de nombreux projets mais les difficultés financières de Revue Noire se firent si pressentes qu’à la fin 2000, nous arrêtâmes la revue et toutes les productions audio-visuelles. Tout en gardant l’édition de livres car nous devions terminer le travail important de trois ans que je menais avec N’Goné Fall de l’Anthologie de l’Art Africain du XXe siècle (complétant en quelque sorte l’Anthologie de la Photographie africaine).
  
Le nom de N’Goné apparaît enfin, car dans la complicité avec Bouna, N’Goné était là. Mais je n’oserais pas évoquer ce rapport particulier très fraternel, qu’elle entretenait avec Bems (c’est comme cela qu’elle l’appelait).
  
Puis Bouna se lance dans la peinture avec une gestuelle qui le ravit. Faire vite à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, dans n’importe quel endroit. Il aurait pu être proche de l’« écriture automatique » comme des expériences picturales d’Henri Michaux, mais nous n’y sommes pas du tout. À partir de ce moment, notre complicité artistique se distend et nous nous éloignons l’un de l’autre, tout en nous revoyant régulièrement. Nous gardions cette amitié des compagnons de route d’une décennie prolifique pour tous.
  
Je t’aime toujours Bouna. Dans ton orgueil, dans ton trouble, dans tes images de la nuit comme du jour. Tu faisais partie de Revue Noire, tu en étais le chantre et le génie avec N’Goné Fall, Isabelle Boni Claverie, Pascal Martin Saint Leon, Simon Njami et tant d’autres qui sans nul doute peuplent ta nuit désormais silencieuse. Comme tu aimais la contempler parfois de si prés.
  
Jean Loup Pivin, décembre 2017

Bouna Medoune Seye, 1995 © Photo P. Martin Saint Leon
Bouna Medoune Seye, 1995 © Photo P. Martin Saint Leon

La plupart des publications de Revue Noire évoquant Bouna Medoune Seye sont aujourd'hui épuisés.
  

” Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar”

  

Texte de Jean Loup Pivin dit en 'voix off' par Bouna pour son film ” Saï Saï By ”,

fiction de 1995 de 10’40 réalisée par Bouna Medoune Seye, produit par Revue Noire

  

Scénario :

  
Saï Sai By parle de la drogue et du sida à Dakar.
Il parcourt une dernière fois les ruelles des Tapats de Dakar, à la recherche de sa drogue, cognant aux tôles ondulées de la banlieue désœuvrée pour acheter quelques grammes et repartir pour un dernier shoot auprès de ses fantômes…
  

Script :

  

Saï Saï By talks about drugs and AIDS in Dakar.

The man has just learned he has AIDS, his days are numbered.

He goes for a last time through the back streets of the Dakar’s Tapats as always in search of his drug, hitting the corrugated iron sheets of the idle suburb to buy a few grams and leave for a last shoot with his ghosts ...

  

Image du film "Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar" 1995 © Bouna Medoune Seye / Revue Noire
Image du film "Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar" 1995 © Bouna Medoune Seye / Revue Noire

 

 

Bouna Medoune Seye pendant le tournage de son film "Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar", 1995 © Photo Revue Noire
Image du film "Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar" 1995 © Bouna Medoune Seye / Revue Noire
Image du film "Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar" 1995 © Bouna Medoune Seye / Revue Noire
Image du film "Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar" 1995 © Bouna Medoune Seye / Revue Noire

L’homme dit en voix off :

  

– J’aime la nuit… avec juste la blancheur de la lune

et la lumière des hommes pour éclairer mes désirs et guider mes pas…

  

J’aime la nuit…

avec ses bruits de voix étouffées… toujours au loin…

avec ses portes fermées le jour qui s’ouvrent enfin…

  

J’aime la nuit…

qui n’en finit pas de me recevoir avec ses mystères et mes rêves.

  

Même le jour, ça devrait être la nuit.

  

Pourquoi ces regards pleins de pitié et de morale ?

J’en ai rien à foutre ! Tirez-vous de ma tête.

J’irai pas crever à l’hôpital…

j’irai plus…

plus jamais…

  

Je laisserais mon sang pourrir dans d’autres nuits,

avec d’autres étoiles que les leurs…

  

Pourrir comme Dakar la salope, jolie, jolie, avec le vent dans la tête.

  

Le regret de quoi ? … Le regret de rien…

Le vent balaye tout… ici ou ailleurs.

  

Être seul… depuis longtemps… trop longtemps…

avec la tête qui craque toute la journée

comme une barque dans les vagues…

  

Seul… à chercher toujours…

Sans pouvoir dire une fois…

que le Saï Saï me bouffe… et que c’est… chiant.

  

La mort… c’est qu’un tas de poudre dans lequel t’es toi-même

  

Une nuit, une seule nuit.

Et je me casse.

Je ferai plus chier personne.

  

Une nuit, une nuit seulement.

Le reste est déjà mort…

  

Seule ma nuit peut être vivante… comme ma première vraie nuit…

dans une ville qui parle plus… qui bouge pas…

sans bruit… sans mouvement…

  

Le silence

  

Va te faire foutre, Dakar, Dakar la salope.

Va te faire foutre Sida, Saï Saï By.

Ma dernière nuit… elle est à moi.

  
  

Voix off du film ” Saï Saï By, dans les Tapats de Dakar ” dit par Bouna Medoune Seye (réalisateur),

écrit par Jean Loup Pivin [sous la signature Wouali Wouala], 1995

  
  

The man said in voice off :

  

– I love the night… with just the whiteness of the moon

and people’s lights to clarify my desires and to guide my steeps…

  

I love the night…

with its sounds of smothered voices… always far away…

with its closed doors that the day finally opens…

  

I love the night that never stops receiving me with its mysteryes and my dreams.

Even the day, it should be the night.

  

Why these looks full of pity and morality ?

I don’t give a fuck ! Get away from my head.

I’ll never go die in the hospital.

I won’t go back…

Never

  

I will let my blood rot in other nights,

with other stars than theirs...

  
  

Rot like Dakar the slut, pretty, pretty, with the wind in my head.

  

Regret what ? ... Regret nothing…

The wind pushes everything around… here or elsewhere.

  

To be alone... for a long time... too long...

with my head cracking all day

like a raft in the waves...

  

Alone... Alone to search forever...

Without the power to once say...

that the Saï Saï devours me... and that it's... too much.

  

Death…, it’s just some powder in which you are yourself

  

One night, one single night.

And I break myself.

I won’t trouble anyone anymore.

  

One night, only one night.

The rest is already dead…

  

Only my night can be alive… like my first real night…

in a city that no longer speaks… that no longer moves…

without noise… without motion…

  

Silence.

  

Go fuck yourself, Dakar, Dakar the slut.

Go fuck yourself, AIDS, Saï Saï By.

My last night… it belongs only to me.

  
  

voice off from the fiction ” Saï Saï By ” said by Bouna Medoune Seye, 

translation from French by Liz Mermin,

written by Jean Loup Pivin [under the signature Wouali Wouala], 1995.